Jean-Michel Utard
Centre de recherche sur l'action politique en Europe (CRAPE, UMR CNRS-Université Rennes 1)
(Communication au Dixième Colloque Bilatéral franco-roumainPremière Conférence Internationale Francophone en
Sciences de l'Information et de la Communication (CIFSIC) Bucarest, 28 juin-2 juillet 2003)
(...)
Le journalisme me paraît à cet égard exemplaire. Alors que l'existence d'un discours publicitaire, scientifique, politique, etc. ne semble faire aucun doute, affirmer qu'il y a un discours journalistique paraît incongru, voire paradoxal. On parle plus volontiers du discours de l'information ou du discours des médias : ce qui conduit à assimiler le journalisme à l'une ou l'autre de ces dimensions, et en même temps à le faire disparaître comme pratique discursive spécifique.
Le journalisme ne mérite ni cet excès d'honneur, ni cette indignité. La production d'information n'est pas l'apanage exclusif des journalistes et les entreprises médiatiques ne sont pas le seul lieu où s'exerce leur activité. La définition du journalisme souffre d'une conception restrictive de ses lieux d'exercice et d'une conception excessive de son rôle dans la production et la circulation de l'information.
C'est oublier que le journalisme est lui même une construction historique et s'est constitué comme profession par exclusion d'autres acteurs sociaux (les politiques, les écrivains, les experts, les amateurs, etc.). La cohérence de cet ensemble « tient non pas à la nature de l'activité, mais à des propriétés de réalisation de celle-ci (principale, régulière, rétribuée, et dans un entreprise médiatique) »[2]. En d'autres termes, s'il est possible, même juridiquement, de dire qui est journaliste et qui ne l'est pas, il est difficile de définir le journalisme.
Idéalement, sinon idéologiquement, l'imaginaire journalistique s'est construit autour de la figure de la médiation. A égale distance des sources qui l'alimentent, des publics auxquels il s'adresse et des employeurs qui le rétribuent, le journalisme jouerait un rôle essentiel dans le fonctionnement de la démocratie, fournissant l'information nécessaire à l'activation du lien social et au débat public. C'est la figure dominante du journaliste politique.
Le journalisme est alors construit en opposition avec son contre-modèle : le publicitaire. Ce dernier est lié à la source de l'information, l'annonceur, pour promouvoir de façon stratégique des produits dont la consommation renvoie à la satisfaction d'intérêts individuels. À l'inverse, le journaliste serait indépendant de sa source pour rapporter de façon objective des faits qui renvoient à l'intérêt général. D'où la construction d'une opposition controversée entre l'information et la communication.
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