par Marc-François Bernier
Professeur titulaire
Département de communication
Professeur titulaire
Département de communication
Université d’Ottawa
mbernier@uottawa.ca
Par la création d’un site Internet
multimédia de nouvelles locales et régionales, Télé-Québec peut contribuer
positivement à améliorer la diversité et l’accessibilité de l’information au
Québec.
Alors qu’on a de plus en plus
facilement accès aux informations sur ce qui se passe dans les grandes villes
du monde, on en sait de moins en moins en ce qui concerne l’information locale
et régionale au Québec. Les récentes mises à pied intervenues dans les
médias d'information aggravent la situation, sans compter les problèmes d'indépendance journalistique qui existent dans de nombreux médias régionaux, les journaux hebdomadaires surtout. L'indépendance économique des journalistes de Télé-Québec les mettrait à l'abri des pressions que font souvent peser les élus et les annonceurs en région.
Il est illusoire de demander à
l’État québécois d’intervenir pour forcer les conglomérats médiatiques commerciaux que sont Gesca, Québecor Media ou TC Média à produire davantage
d’informations locales et régionales.
Mais il est réaliste que l’État québécois accorde un mandat d’information
locale et régionale à Télé-Québec.
Au lieu d’avoir les très coûteux
studios de télévision et de radio des médias traditionnels, au lieu de procéder
à des transformations organisationnelles majeures, et sans devoir demander une
modification à sa licence auprès du CRTC, Télé-Québec peut simplement créer un
site Internet d’information multimédia.
Le mandat se limiterait à
l’information factuelle, au journalisme d’enquête, à l’information locale et
régionale du Québec. Contrairement à ce qui se voit de plus en plus à
Radio-Canada, ce site ne contiendrait aucun contenu éditorial ou blogue. Sa
vocation serait de diffuser des informations journalistiques d’intérêt public
et non de participer à l’inflation des sites d’opinion.
Il faut que ce média soit neutre
sur le plan politique, même s’il ne sera jamais possible de le protéger contre
la suspicion, la même qui pèse sur Radio-Canada du reste, ce qui ne l’empêche
pas d’être un grand (multi)média d’information.
Le site de Télé-Québec
nécessiterait l’embauche de quelques dizaines de journalistes maîtrisant bien
les techniques du multimédia, sur tout le territoire du Québec. Les coûts
pourraient être récupérés à même le budget actuellement consacré aux magazines
d’actualité ou d’affaires publiques qui, parfois, nous offrent les mêmes
journalistes, les mêmes personnalités, les mêmes opinions et les mêmes thèmes que les médias
traditionnels. Les journalistes pourraient être pigistes (et rémunérés
convenablement) ou permanents, selon les choix des gestionnaires et leur marge
budgétaire.
La politique, les faits de société,
les arts, la culture, la science, l’environnement, la santé et les sports
seraient au coeur de ce site généraliste dont les informations exclusives
pourraient être reprises par les médias traditionnels. L’information en provenance des régions peut être pertinente, et elle peut toucher à de grands enjeux globaux
(économie, environnement, justice sociale, droits humains, etc.).
Au lieu de se limiter à vouloir
changer ce qui ne marche pas, et ce qui ne marchera peut-être jamais vraiment
mieux au sein des médias qui existent, pourquoi ne pas chercher plutôt à
ajouter, à diversifier ?
Télé-Québec peut avoir un tel
mandat qui contribuera positivement, et concrètement, à améliorer le bilan
informationnel et journalistique du Québec.
En prenant radicalement le virage
Internet et multimédia, Télé-Québec peut devenir la référence du journalisme
numérique de qualité. Il peut servir de laboratoire pour les entreprises du
secteur privé pour lesquels il aura une fonction d’émulation.
Il ne faut pas créer un site
Internet de type « dossiers » ou « documentaire », qui ne
ferait que proposer, sur une nouvelle plate-forme, le contenu déjà présenté à
l’écran, ou dans les hebdomadaires régionaux. Il faut un véritable site de nouvelles, mis à jour minute après
minute. Il deviendra le rendez-vous des citoyens de toutes les régions, et
proposera une approche journalistique plus pertinente que celle que fournissent
bon nombre de journaux hebdomadaires qui diffusent surtout de la publicité, des
publireportages et des contenus complaisants pour les élites locales.
Il se s’agit pas de saborder
Télé-Québec, mais plutôt de réaffecter des ressources pour desservir les
régions, en priorité celles qui ne possèdent pas de médias d’information privés
pouvant les informer sur une base quotidienne.
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